Prédication   – Esaïe 60, 1-6+18-22,   Ephésiens 3, 2–6, Matthieu 2, 1-12
Kaïrete ! Bonjour à vous en grec ! χαίρετε ! Salut ou plutôt Joie, joie en ce début d’année ! car la salutation résonne comme une exclamation et un souhait : Kaïré – Χαίρε Maria, réjouis-toi Marie, dit l’Ange, mais aussi avec chacun de vos prénoms, si tant est que l’Evangile nous parle de la « mega joie », c’est écrit ainsi, ressentie si fortement par les mages au moment où l’Etoile leur a indiqué le lieu où était l’enfant.
Ils ont été saisis, remplis, habités ces hommes qui tout à coup avaient trouvé, après bien des détours et des mirages, le Roi recherché dont l’Etoile avait brillé.
Kaïré ! Joie immense quand les chemins de nos vies sont faits de rencontres dont certaines nous enfantent vraiment.
Alors je me demande, de manière peut-être saugrenue, vous me pardonnerez :  et si les mages, en repartant de la crèche, avaient pris, comme vous, comme moi, de bonnes résolutions ? Car on ne peut les imaginer continuant comme avant, comme si rien ne c’était jamais passé, non,… leur vie, leur regard ont dû être retourné pour toujours, pour croire ailleurs, au loin, autrement. Emportant avec eux un présent bien plus précieux que l’or, la myrrhe ou l’encens.
Ils étaient venus comme des astronomes, des spécialistes du firmament, habitués à scruter la voie lactée, à nommer, détailler avec rigueur et précision, et voilà que tout change devant un autre éclat…
1) Et si la première bonne résolution des mages, c’était désormais d’avoir un peu moins les yeux dans l’infini des étoiles, mais de garder cette curiosité en marche, pour se réjouir, s’émerveiller de ce qui est parfois caché, mais à notre portée, juste sous notre nez, mais qui demande à être trouvé. Comme le Christ qui aime être cherché et qui ne se donne qu’aux Avent-uriers, non pas aux Hérodes dans leur palais, aux scribes et prêtres immobiles, enfermés dans leur vérité. Le Christ qui aime être cherché, comme il le dira lui-même : « Je vous précède en Galilée, c’est là que vous me trouverez ».
La bonne résolution commune, ce serait de garder les yeux un peu plus ouverts pour apprendre à discerner la vie nouvelle à naître et à surgir tout au long de cette année. Si Dieu a choisi d’habiter le monde par l’Enfant de Noël, c’est pour que dans l’épaisseur de nos nuits, dans la clarté de nos jours, sous l’apparence des choses et des êtres, il y ait une présence secrète et féconde, comme un levain dans la pâte, un ferment en devenir, comme une pousse qui aimerait jaillir.
Une nouvelle année nous est donnée pour toujours mieux écarquiller les yeux et croire à la vie offerte malgré tout si belle  en sa nouveauté !
2) la deuxième bonne résolution des mages, ce serait aussi d’avoir un peu moins la tête dans la course des étoiles où tout serait écrit d’avance ou presque, à la manière d’une horoscope qui ferait la pluie et le beau temps, pour désormais se laisser guider, mieux écouter cette voix qui leur a dit en songe de ne pas retourner chez Hérode, mais de prendre un autre chemin pour rentrer. Oui, il y a dans ce monde plus que simplement le savoir, les prévisions. Il y a ce désir de Dieu qui oriente nos choix, nous invite à être conduit pour rentrer dans une autre dimension, une co-naissance, une intuition, une certitude intérieure, une vocation. Redevenir comme un enfant.
La bonne résolution, ce serait d’écouter cette voix qui nous invite, nous souffle les mots de sa tendresse, qui prévient et oriente pour que l’on puisse toujours aller sur des chemins inspirés.
J’aimerais croire que les mages qui avaient regardé l’extérieur du Ciel étoilé, le monde avec ses riches et ses puissants, la ville et ses habitants, sont repartis avec le souhait de faire plus de place au silence, à ce qui résonne comme un appel, qui vient ouvrir un espace personnel pour se laisser habiter. Et c’est tout un univers aussi à explorer ! la carte de notre ciel intérieur ! ne sommes-nous pas nous non plus poussière d’étoiles, portant l’infini au-dedans de nous ?
Une nouvelle année nous est donnée pour mieux tendre le cœur vers la lumière que Dieu vient faire étinceler !
3) La troisième bonne résolution des mages, ce serait également d’avoir un peu moins les pensées dans la lune et les astres en s’évadant dans l’immensité, pour garder les pieds sur terre pour ne plus jamais se décourager devant les obstacles qu’on a devant soi, les détours, les impasses de la vie.  Il aura fallu le passage chez Hérode pour bifurquer du palais vers une modeste crèche. Et si les échecs pouvaient être des portes ouvertes sur autre chose ? et si les prises de consciences pouvaient être des choix nouveaux ? On peut se tromper, certes, mais n’est-ce pas ce qui rend la vie plus vraie lorsque l’on a pu poursuivre avec courage et ténacité ? Les mages étaient venus d’orient, là où la lumière se lève et marchent vers une autre lumière, Celle du Christ qui nous relève !
La bonne résolution ce serait de trouver dans le pardon et la grâce, cette force de toujours recommencer pour ne pas craindre tout ce qui pourrait encore nous arriver. Saviez-vous qu’en grec, la grâce – Xaris est la même racine que le mot joie, Xairo ? Et si la joie était une raison de vivre avec gratuité ? Et la grâce ce qui brille, ce qui réjouit ?
Une nouvelle année nous est donnée pour toujours espérer comme une joyeuse faveur imméritée !
4) La 4e bonne résolution des mages, ce serait d’avoir un peu moins les idées toutes faites, pour désormais ne plus se laisser impressionner par tous les Hérodes que l’on peut rencontrer. Oui, en passant d’un roi à un autre, ils n’ont pas tout à fait trouvé la même réalité, les mages. Ils ont dû changer leurs valeurs…
La bonne résolution, ce serait alors de se détourner des fausses … résolutions !  De l’immédiat, du superficiel, de l’instantané parfois si flatteur, pour essayer de trouver ce qui se construit dans la lenteur d’une fidélité, dans le si simple en apparence.
J’aimerais croire que les mages ont changé leur regard sur le monde, ne s’arrêtant désormais pas aux titres ni aux apparences, aux annonces tonitruantes, mais assurés que ce qui triomphe n’est pas la force, l’arbitraire, les menaces, le mensonge, mais au contraire ce qui est accueil, douceur et bienveillance, à l’image de l’Emmanuel, présent là où 2 ou 3 se retrouvent en son Nom.
Une nouvelle année nous est donnée pour toujours mieux se rapprocher du Christ, notre Paix !
5) et puis la 5e et dernière résolution ( on arrive au bout, rassurez-vous !), ce serait pour les mages, et j’en reviens au début de notre dé-marche, de garder en eux la joie, la très grande joie, même qu’ils ont ressentie.
Oui, comment garder malgré les peurs, les Hérodes d’aujourd’hui, malgré les obstacles, malgré les bons conseils de ce monde, malgré les discours scientifiques et rationnels, la joie toute neuve de Dieu en nous ?
La bonne résolution, ce serait de cultiver cette joie, de la faire grandir au contact de Celui qui n’est pas venu nous alourdir, mais au contraire, comme pour les mages, nous faire découvrir qu’il y a plus de joie à donner, plus de joie à croire qu’à maîtriser, plus de joie dans l’écoute que de s’imposer, plus de joie à repartir qu’à s’installer. Que la joie est vraiment source de liberté.
J’aimerais croire que les mages ont été durablement habité de cette joie divine et qu’ils l’ont faite rejaillir sur d’autres, qu’ils ont déposé des bagages bien plus immatériels, mais plus précieux, en devenant ainsi les porteurs d’une proximité inédite, à cause de ce Dieu fragile, ce Dieu si humain, ce Dieu de naissance qui est avec nous, sur tous nos chemins d’enfantement, nos jardins féconds, nos compostelle, nos champs des étoiles !
Une nouvelle année nous est donnée pour faire route ensemble, en accrochant nos vies à une Etoile, celle du Roi promis : n’est-ce pas-là une bonne résolution ?
Amen
De bon matin, ils se sont mis en route
Les rois-voyageurs d’un pays lointain
Ils ont parcouru les dunes et le sable
Suivant l’Etoile qui leur traçait un chemin
Ils emportaient avec eux des parfums inconnus
Senteurs, biens précieux, trésors pour dire Dieu
Encens qui se libère dans la chaleur de la braise
Or pur qui vient se lover au creux de la main
Myrrhe qui embaume la tristesse
Quand disparait l’espoir des lendemains
Sans quitter l’Astre du regard
Ils avaient hâte de saluer le Roi des rois
De s’abaisser devant le Puissant de la terre
De rendre hommage à celui qui imposerait sa loi
Quelle ne fut pas leur surprise
De découvrir, humble et sans parterre
Un enfant emmailloté comme un cadeau
Les voilà donc riches de cette rencontre qui se dévoile
Secret d’une aube qui s’éveille sur la terre des vivants
Déjà ils pourront mettre les voiles
Sur d’autres horizons où l’on reçoit au-delà de tout argent
Dors ma merveille
Car le souffle te berce dans la paix du froment
Tu seras pain de la terre au jour du soleil
Etoile qui brille pour toujours au firmament