IMG_0740Extraits d’un message adressé par Geneviève Micheli aux femmes de pasteurs du canton de Vaud en 1938.

Quand nous faisons silence, il se passe de grandes choses. Il semble que, l’un après l’autre, tous les revêtements inutiles tombent, les visages d’emprunt disparaissent, les encombrantes richesses ou pauvretés sont déposées.

Nous réalisons alors seulement que nous transgressons continuellement les lois divines, toutes naturelles, toutes simples, lumineuses et vraies qui sont celles de la grande nature sous le ciel de Dieu – celle de la semence qui est en terre et qui, dans le secret, se développe – celle du fruit qui se noue et mûrit sans le secours de l’homme, ou plutôt seulement parce qu’il bêche, arrose et fume sans trépidante agitation, sans hâte, en accord avec les lois de la nature, dans la patience. (…)

Je pense que lorsque Christ était sur terre, sa rencontre avec une âme avait toute l’ampleur, et la puissance d’un silence tout pénétré de Dieu. Aujourd’hui, il en est de même. Il libérait l’être humain de sa cristallisation, de ses fausses richesses, de sa dispersion qui est une mort, et il affirmait la puissance de Dieu. Il est beau de mourir tout entier quand lui vit. Quand nous déciderons-nous à mourir pour enfin vivre ? Et la mort est un silence. Il faut que se taisent les voix discordantes, les voix orgueilleuses, impérieuses, les haines, les rancunes, la volonté dominatrice, les demandes personnelles. Le silence est une purification.

Purification, quand d’abord le silence clôt les lèvres, puis pénètre jusqu’à la division de l’âme, dans les régions inaccessibles où Dieu repose en nous.

Se voir enfin et voir sa vie dans une atmosphère dégagée des hommes, des choses, dans la clarté pure et lumineuse de Dieu. Jésus disait « dans la vérité ».

Silence des affections, des antipathies, silence des désirs dans ce qu’ils ont de trop ardent, silence du zèle dans ce qu’il a d’indiscret, silence de la ferveur dans ce qu’elle a d’exagéré. (…)

Silence de communion : Le silence est une grâce profonde qui est donnée à certaines heures et qui nous fait comprendre l’amour parfait. Dans le silence à plusieurs, on reçoit l’une par l’autre des forces extraordinaires, l’union se fait sur un plan surnaturel, les âmes sont transparentes les unes aux autres et elles sont lumineuses parce que vues à la lumière de Dieu.

Quand ce silence-là se sera fait en nous, ce silence de nous-mêmes, il y aura le grand accord intérieur qui est le silence de Dieu. Ce silence de l’âme aux écoutes qui est une attente de la révélation, de l’ordre, attente de l’amour. C’est le silence puissant et doux, le silence de l’amour parfait qu’a entendu Elie, le silence qu’a continuellement connu le Christ quand il montait sur la montagne pour prier, le

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silence dans lequel il pénétrait avec joie et actions de grâces quand il s’unissait à Dieu. (…)

Dieu ne peut être approché que dans le silence parce qu’il est quelqu’un de Si immense que nous ne pouvons être devant lui que comme celui qui est prosterné et qui attend : « Je me tairai, je mettrai la main sur ma bouche. » Dieu seul sait, juge et crée. (…)

C’est son esprit, sa volonté, sa vie qui doivent être tout en nous. C’est la création de l’homme nouveau.

Quand on a vécu dans le silence avec Dieu, quand on a reçu de lui ce baptême du silence, ce sacrement du silence, de la purification intérieure, de l’humilité, de l’amour, cette création de l’homme nouveau, on peut rentrer dans la vie sans crainte, sans effroi, car le silence de Dieu est en nous.

Alors nous pouvons vivre et accepter la vie que Dieu nous demande d’un cœur pur et aimant, le cœur qui sait que l’Esprit souffle en tous lieux ; nous vivons d’un cœur libéré et recueilli avec nos frères et sœurs quels qu’ils soient, non pas mis à part, mais dans la vie quotidienne, dans le quotidien du bruit, du relatif, du péché, du désordre. Là où Dieu nous a mis est le lieu de notre sainteté. Et là nous avons le silence.

Le jour où il nous manque, c’est que nous n’avons pas su le prendre.

Tous les bruits qui nous entourent font beaucoup moins de tapage que nous-mêmes. (…)