Homélie par le pasteur Marc Balz, 26 janvier 2020
Convertissez-vous : le Règne des cieux s’est approché proclame le Christ
Es 9, 1-3
1 Co 1, 10-17
Mt 4, 12-22
J’aimerais commencer par 3 exemples d’actualité.
Ces temps, le secteur bancaire et certaines grandes entreprises opèrent ces temps des conversions incroyables : les investissements deviennent verts et durables, le Forum de Davos en a fait son thème. Est-ce sincère ou forcé ? S’agit-il d’un green washing intéressé parce qu’il y encore plus à gagner dans les énergies renouvelables, ou une prise de conscience fondamentale et irréversible ? On se pose la question. Et qu’en aurait pensé celui dont la première parole est « convertissez-vous » ?
Voici 10 jours, les médias suisses parlaient de l’ancien directeur de la banque d’Angleterre Mark Carney, usé par une tâche harassante et qui n’avait plus de sens pour lui. Il avait déclaré publiquement : Les grandes firmes qui ne s’engageraient pas pour le climat sont vouées à disparaître.
Il vient de tout plaquer pour devenir bénévole à l’ONU, en tant qu’envoyé spécial pour le climat. Il gagnera 1$ par an (vu ses précédentes fonctions, on se dit qu’il avait peut-être des réserves), mais – et c’est cela qui est important – il se réveillera le matin sans doute plus en paix et en retrouvant du sens à sa vie.
Il s’agit certainement d’une forme de conversion, on devrait dire « laïque ».
Enfin, de plus en plus nombreuses sont les personnes qui réalisent que leur vie ne plus plus continuer ainsi vu l’état de la planète, vu les non-sens de leur activité, et elles changent. Parfois modestement, en faisant ses propres produits d’entretien, en recyclant tout ce qui peut l’être, en renonçant plus ou moins à manger de la viande, à prendre l’avion, ou un portant aussi des habits plus usés qu’avant. Des changements louables, certes, mais s’agit-il de conversion au sens où Jésus le proclame ?
Et nous qui sommes ici, fidèlement parfois depuis très très longtemps. Quelle conversion sommes-nous appelés à faire ? N’y a-t-il pas longtemps que nous nous sommes convertis ? Et peut-être avons-nous été toute notre vie fidèle au Christ. Comment dès lors nous convertir encore ?
« Convertissez-vous : le Règne des cieux s’est approché (avant d’ajouter personnellement à 4 d’entre eux) : Venez à ma suite et je vous ferai pêcheurs d’hommes.
Une chose me paraît claire : ceux auxquels s’adresse Jésus sont croyants. Comme nous. La conversion n’est donc pas ici, ni pour eux ni pour nous probablement, le passage de la non foi à la foi, comme si on avait dit « avant, je ne croyais en rien et maintenant je me suis converti ». Il s’agit d’autre chose. Alors quoi ?
Convertissez-vous, metanoeite en grec. Meta, ce qui dépasse, qui met au-dessus et noéô : percevoir, penser : ce mot parle d’un changement de niveau de pensée. Pour Jung, cela désigne une transformation de la psyché, une guérison, une transformation complète de la personne. Peut-être pourrait-on parler de retournement de tout l’être, de mutation, de révolution intérieure, ou même de coup de foudre ? Dans tous les cas, Jésus nous appelle à un changement de niveau, à aller plus haut, ou plus profond, ou tous les deux à la fois. Nous sentons bien qu’il ne s’agit pas de cosmétique, de green washing spirituel, mais d’un volte-face qui n’est jamais achevé.
Convertissez-vous, shuv en hébreu, se tourner.
Dans le Psaume du bon berger, on lit au début « Le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien. Il me fait coucher dans les verts pâturages, il me dirige vers les eaux paisibles. Il restaure mon âme » (Nafschi ieshovev, justement ce verbe shuv, se convertir, apparaît ici) La meilleure traduction que j’aie trouvé, mot à mot, dit « il fait revenir mon être » ! Voilà la clé.
Convertissez-vous : le Règne des cieux s’est approché. Jésus dit en quelque sorte : Dieu est maintenant présent pour toi, sa présence fait revenir ton être tout entier. La présence de Dieu fait irruption ici et maintenant pour toi, pour que ton être entier, ou des parts de celui-ci, qui étaient perdues, ou éparpillées aux 4 vents, reviennent.
Cette conversion à laquelle il nous appelle est bien plus qu’un demi-tour : c’est un profond changement de niveau, une unification de notre être. Tout un chemin s’ouvre alors, conscient, vivant, humble. Ils laissèrent leur barque et leur père, et le suivirent….